Actualités

Un décret précise la nouvelle obligation générale d’information des salariés qui pèse sur les entreprises depuis le 1er novembre 2023

En application du droit européen, l’employeur doit désormais fournir aux salariés « les informations principales relatives à la relation de travail ». Il doit par ailleurs communiquer aux salariés en CDD et aux intérimaires qui en font la demande la liste des postes en CDI disponibles. Un décret précise les modalités d’application de ces deux obligations d’information.

Décret 2023-1004 du 30 octobre 2023, JO du 31

Obligation de communiquer les principales informations relatives à la relation de travail

Nature des informations à communiquer aux salariés

En application de la directive (UE) 2019/1152 du 20 juin 2019 « relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne », la loi du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne a imposé aux entreprises, quel que soit leur effectif, de remettre à chaque salarié « un ou plusieurs documents écrits contenant les informations principales relatives à la relation de travail » (loi 2023-171 du 9 mars 2023, art. 19, V ; c. trav. art. L. 1221-5-1 ; voir FH 3982).

Le décret du 30 octobre 2023 précise les conditions d’application de cette obligation d’information, qui est entrée en vigueur le 1er novembre 2023 (décret 2023-1004 du 30 octobre 2023, art. 7, II).

Il fixe notamment la liste des éléments à communiquer (c. trav. art. R. 1221-34 modifié). Il s’agit d’un minimum (« les documents mentionnés à l’article L. 1221-5-1 comportent au moins les informations suivantes »), l’employeur conserve donc la possibilité de donner des informations supplémentaires.

Signalons par ailleurs que le décret du 30 octobre 2023 transpose cette obligation générale d’information aux intermittents du spectacle et aux gens de mer (c. trav. art. R. 7122-18 et R. 7122-21 modifiés ; c. transports art. R. 5542-1 à R. 5542-6 modifiés).

Quelles sont les conséquences pratiques de la nouvelle obligation d’information ?

Dans les faits, bon nombre des informations listées par la nouvelle réglementation sont déjà communiquées au salarié par l’intermédiaire du contrat de travail. Il existe par ailleurs des obligations d’information spécifiques, disséminées dans la législation : remise d’une notice sur les garanties souscrites en matière de prévoyance complémentaire (c. séc. soc. art. L. 932-6), remise d’une notice sur les textes conventionnels applicables (c. trav. art. R. 2262-1), etc.

La tâche des entreprises va donc consister à vérifier si elles transmettent bien toutes les informations listées par la nouvelle réglementation et si elles le font dans les délais et selon les modalités exigées, pour éventuellement adapter leurs pratiques.

À noter que l’obligation de remettre au moment de l’embauche une notice sur les textes conventionnels applicables dans l’entreprise ou l’établissement, évoquée plus haut, a été absorbée par le nouveau dispositif : c’est donc désormais dans le cadre de l’obligation générale d’information que l’employeur informe le salarié des conventions et accords collectifs applicables dans l’entreprise ou l’établissement (c. trav. art. R. 2262-1 modifié).

Modalités de transmission des informations

Délai de transmission

Certaines informations doivent être transmises dans les 7 jours calendaires suivant la date d’embauche (lieu de travail, intitulé du poste, date d’embauche), d’autres dans le mois (durée du congé annuel payé, procédure à suivre en cas de rupture du contrat de travail, conventions et accords collectifs applicables… ; c. trav. art. R. 1221-35 modifié).

Degré de détail de l’information

En règle générale, l’employeur doit délivrer les informations in extenso. Néanmoins, pour un certain nombre d’éléments, limitativement énumérés, il peut se contenter d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles applicables (c. trav. art. R. 1221-35 modifié).

Format papier ou électronique

L’employeur adresse ces informations au format papier, par tout moyen conférant date certaine (c. trav. art. R. 1221-39 nouveau). Il peut donc s’agir, par exemple, d’un recommandé avec accusé de réception ou d’un document remis en main propre contre décharge.

L’employeur peut également adresser ces informations au format électronique :

  • si le salarié dispose d’un moyen d’accéder à une information sous format électronique ;
  • à condition que les informations puissent être enregistrées et imprimées ;
  • et à condition de conserver un justificatif de la transmission ou de la réception de ces informations.

Un arrêté proposera des modèles de documents visant à faciliter la mise en œuvre de cette obligation (c. trav. art. R. 1221-35 modifié).

En cas de modification

Lorsqu’une ou plusieurs des informations délivrées au moment de l’embauche doivent être modifiées, l’employeur remet au salarié un document indiquant ces modifications. Cette « mise à jour » intervient dans les plus brefs délais et au plus tard à la date de prise d’effet de la modification, selon les modalités initiales (format papier ou, sous certaines conditions, électronique).

L’employeur est dispensé de cette obligation de mise à jour lorsque la modification résulte exclusivement d’un changement des dispositions législatives et réglementaires ou des stipulations conventionnelles en vigueur (c. trav. art. R. 1221-40 nouveau).

Liste des informations à délivrer aux salariés (c. trav. art. R. 1221-34 modifié) :

  • Informations à communiquer au plus tard le septième jour calendaire à compter de la date d’embauche
  • Identité des parties à la relation de travail.
  • Lieu (éventuellement lieux) de travail et, si elle est distincte, adresse de l’employeur.
  • Intitulé du poste, fonctions et catégorie socioprofessionnelle ou catégorie d’emploi.
  • Date d’embauche.
  • En cas de relation de travail à durée déterminée, date de fin ou durée prévue.
  • En cas de période d’essai, durée et conditions de cette période d’essai (1).
  • Rémunération (1) :
  • éléments constitutifs (c. trav. art. L. 3221-3), indiqués séparément, y compris les majorations pour les heures supplémentaires ;
  • périodicité de paiement ;
  • modalités de paiement.
  • Durée du travail (1) :
    • durée de travail quotidienne, hebdomadaire, mensuelle ou, le cas échéant, modalités d’aménagement sur une autre période de référence lorsque l’entreprise applique un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, que ce soit en application d’un accord collectif ou du mécanisme réglementaire « par défaut » (c. trav. art. L. 3121-41 à L. 3121-47 ; voir « Temps de travail, salaire et formation », RF 1146, §§ 2350 et s.) ;
  • conditions dans lesquelles le salarié peut être conduit à effectuer des heures supplémentaires ou complémentaires ;
  • le cas échéant, toute modalité concernant les changements d’équipe en cas d’organisation du travail en équipes successives alternantes.
  • Informations à communiquer au plus tard 1 mois à compter de la date d’embauche
  • En cas de travail temporaire, identité de l’entreprise utilisatrice lorsqu’elle est connue et aussitôt qu’elle l’est.
  • Droit à la formation assuré par l’employeur (c. trav. art. L. 6321-1 ; voir RF 1146, § 3600) (1).
  • Durée du congé annuel payé auquel le salarié a droit ou modalités de calcul de cette durée (1).
  • Procédure à observer par l’employeur en cas de cessation de la relation de travail (1).
  • Conventions et accords collectifs applicables au salarié dans l’entreprise ou l’établissement (2).
  • Prévoyance (1) :
  • régimes obligatoires auxquels est affilié le salarié ;
  • mention des contrats de protection sociale complémentaire dont les salariés bénéficient collectivement en application d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur ainsi que, le cas échéant, conditions d’ancienneté qui y sont attachées.

(1) Pour ces informations, les documents communiqués par l’employeur peuvent se borner à renvoyer aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles applicables (c. trav. art. R. 1221-35 modifié).

(2) Cette modalité d’information se substitue, depuis le 1er novembre 2023, à la notice sur les textes conventionnels applicables dans l’entreprise ou l’établissement, que l’employeur devait remettre au salarié au moment de l’embauche (c. trav. art. R. 2262-1, dans sa version antérieure au 1er novembre 2023).

Information des salariés recrutés avant le 1er novembre 2023

En pratique, les salariés recrutés avant le 1er novembre 2023 ont eu connaissance d’un certain nombre d’informations, notamment par l’intermédiaire de leur contrat de travail.

Néanmoins, les salariés déjà en poste au 1er novembre 2023 n’ont pas nécessairement eu connaissance de tous les éléments listés par la nouvelle réglementation. C’est pourquoi le décret du 30 octobre 2023 prévoit que ces salariés peuvent demander à tout moment communication d’un élément d’information répertorié par l’article R. 1221-34 du code du travail qui ne leur aurait pas été transmis.

L’employeur doit satisfaire à cette requête dans les mêmes délais que pour les salariés qu’il vient d’embaucher, c’est-à-dire au plus tard le septième jour calendaire ou au plus tard dans le mois, selon la nature de l’information demandée. Ces délais courent, à notre sens, à compter de la demande (décret 2023-1004 du 30 octobre 2023, art. 7, II).

Information des salariés appelés à travailler à l’étranger

Salariés appelés à travailler à l’étranger pour plus de 4 semaines consécutives

Outre les informations à communiquer dans le cadre du dispositif de droit commun, le salarié appelé à travailler à l’étranger pour une durée supérieure à 4 semaines consécutives doit avoir connaissance, avant son départ, des éléments suivants (c. trav. art. R. 1221-36 et R. 1221-37 nouveaux) :

  • pays dans lequel ou lesquels le travail à l’étranger est effectué, ainsi que la durée prévue ;
  • devise servant au paiement de la rémunération (avec possibilité d’un simple renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles applicables) ;
  • le cas échéant, avantages en espèces et en nature liés aux tâches concernées ;
  • renseignements indiquant si le rapatriement est organisé et, s’il l’est, conditions de rapatriement du salarié.

Le deuxième alinéa de l’article R. 1221-37 du code du travail apporte la précision suivante : « Sans préjudice des dispositions du second alinéa de l’article R. 1221-35 [délai de communication des informations de base], les informations prévues à l’article R. 1221-34 [informations de base] et celles mentionnées à l’article R. 1221-36 [informations spécifiques aux salariés appelés à travailler à l’étranger] sont communiquées au salarié appelé à travailler à l’étranger avant son départ. »

Salariés détachés dans le cadre d’une prestation de services transnationale en UE ou dans l’EEE

Le salarié détaché dans le cadre d’une prestation de services transnationale (dir. 96/71/CE du 16 décembre 1996) et appelé à travailler dans un autre État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen pour une durée supérieure à 4 semaines consécutives doit être informé, en plus des éléments de droit commun (c. trav. art. R. 1221-36 et R. 1221-37 nouveaux) :

  • de la rémunération à laquelle il a droit en vertu du droit applicable de l’État d’accueil (avec possibilité d’un simple renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles applicables) ;
  • le cas échéant, des allocations propres au détachement et des modalités de remboursement des dépenses de voyage, de logement et de nourriture ;
  • de l’adresse du site internet national mis en place par l’État d’accueil, conformément aux dispositions de l’article 5, paragraphe 2 de la directive 2014/67/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à l’exécution de la directive 96/71/CE.

Comme pour les salariés appelés à partir à l’étranger au moins 4 semaines consécutives, toutes les informations requises doivent être communiquées au salarié avant son départ, avec la même problématique pour les informations de droit commun.

En l’absence de transmission des informations, mise en demeure, puis, éventuellement, saisine des prud’hommes

Le salarié qui n’a pas reçu les informations requises dans les délais prévus peut saisir le conseil de prud’hommes.

Mais, avant cela, il doit avoir mis en demeure son employeur de lui communiquer ces informations ou de les compléter. Ce n’est qu’en l’absence de réponse dans les 7 jours calendaires de la réception de la mise en demeure que le salarié peut saisir les prud’hommes (c. trav. art. R. 1221-41 nouveau).

Information des salariés en CDD et des intérimaires sur les postes à pourvoir en CDI

Pour rappel, la loi du 9 mars 2023 impose à l’employeur de délivrer au salarié en CDD ou à l’intérimaire qui le demande une information sur les postes en CDI à pourvoir au sein de l’entreprise. Pour pouvoir faire une telle demande, le salarié doit justifier d’une ancienneté minimale de 6 mois (dans l’entreprise pour le salarié en CDD, dans l’entreprise utilisatrice pour l’intérimaire) (c. trav. art. L. 1242-17 et L. 1251-25 ; voir FH 3982).

Le décret du 30 octobre 2023 complète ces dispositions, qui sont entrées en vigueur au lendemain de sa publication, donc le 1er novembre 2023 (décret 2023-1004 du 30 octobre 2023, art. 7, I).

La réglementation précise que le salarié en CDD ou l’intérimaire doit formuler sa demande par tout moyen donnant date certaine à sa réception (c. trav. art. D. 1242-8 et D. 1251-3-1 nouveaux).

L’employeur a alors un mois pour fournir par écrit la liste des postes en CDI à pourvoir qui correspondent à la qualification professionnelle du salarié ou de l’intérimaire.

Le salarié ou l’intérimaire a droit à deux demandes par année civile. L’employeur est donc dispensé de répondre à une troisième demande.

Lorsque l’employeur est un particulier ou une entreprise de moins de 250 salariés, il peut répondre oralement à compter de la deuxième demande du salarié, si la réponse est inchangée par rapport à celle apportée à la première demande.

L’ESSENTIEL

  • Depuis le 1er novembre 2023, l’employeur est tenu de communiquer à chaque salarié, à la suite de son embauche, les « informations principales relatives à la relation de travail », dont un décret du 30 octobre 2023 fixe la liste.
  • Certaines informations doivent être communiquées dans les 7 jours calendaires suivant l’embauche, d’autres dans un délai d’un mois.
  • Pour certains éléments, l’employeur peut se borner à faire référence aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles applicables.
  • Les informations peuvent être délivrées au format papier ou, sous certaines conditions, au format électronique.
  • L’employeur doit également communiquer les informations mises à jour, lorsque des modifications sont intervenues.
  • Les salariés déjà en poste au 1er novembre 2023 peuvent demander communication des informations dont ils n’auraient pas eu connaissance.
  • Les salariés qui partent travailler à l’étranger bénéficient d’informations complémentaires.
  • Le salarié qui n’a pas obtenu les informations auxquelles il avait droit doit mettre en demeure l’employeur de les lui fournir avant de pouvoir saisir les prud’hommes.
  • Le décret du 30 octobre 2023 précise par ailleurs selon quelles modalités l’employeur doit informer les salariés en CDD et les intérimaires des postes disponibles en CDI. Les intéressés ne peuvent notamment formuler que deux demandes par année civile.

Source : « Un décret précise la nouvelle obligation générale d’information des salariés qui pèse sur les entreprises depuis le 1er novembre 2023 ». La Revue Fiduciaire, 9 novembre 2023. Web 30 novembre 2023.