Actualités

LA CAUTION QUI N’A PAS ÉCRIT ELLE-MÊME LES MENTIONS LÉGALES N’EST PAS RESPONSABLE CONTRACTUELLEMENT

Lorsque la caution n’a pas écrit de sa main les mentions légales et que le cautionnement est en conséquence annulé, le créancier ne peut rechercher la responsabilité de la caution que sur le fondement extracontractuel.

Un particulier, qui s’est rendu caution des crédits consentis par une banque à une société, conteste être l’auteur des mentions manuscrites prescrites par les articles L 331-1 et L 331-2 du Code de la consommation à peine de nullité de son engagement et il obtient l’annulation du cautionnement. La banque forme alors contre lui une demande de dommages-intérêts, lui reprochant notamment d’avoir commis une faute de négligence en ne rédigeant pas les mentions manuscrites et un manquement à son obligation de loyauté et de bonne foi contractuelle (C. civ. art. 1104 ; ex-art. 1134, al. 3).

La Cour de cassation rejette l’action en responsabilité contractuelle de la banque contre la caution. Par l’effet de l’anéantissement rétroactif du contrat annulé, la responsabilité de l’auteur de la nullité ne peut être recherchée que sur le fondement extracontractuel.

A noter : Précision inédite. Dans la même affaire, la Cour de cassation avait, au visa de l’article 1240 (ex-art. 1382) du Code civil posant le principe de la responsabilité extracontractuelle, censuré la décision d’une cour d’appel qui, après avoir annulé le cautionnement, avait rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la banque contre la caution, sans rechercher, si, en faisant reproduire les mentions manuscrites par un tiers, en dépit des précisions données dans les actes soumis à sa signature, la caution n’avait pas commis une faute (Cass. com. 18-1-2017 no 15-13.392 F-D : RJDA 12/17 no 838).

Dans l’arrêt ci-dessus, la Cour suprême ne se prononce pas sur le comportement fautif ou non de la caution, mais sur la nature de la responsabilité de celle-ci ; cette responsabilité ne peut être qu’extracontractuelle puisque le cautionnement a été annulé, avec effet rétroactif. Par suite, la banque ne pouvait pas reprocher à la caution un manquement à son obligation de loyauté ou de bonne foi contractuelle.

Il sera plus difficile pour le créancier d’invoquer une faute extracontractuelle. Mais il ne faut pas non plus prendre le risque de neutraliser la sanction de la nullité du cautionnement pour défaut de mentions manuscrites, voire de vider le dispositif protecteur légal de sa substance.

La solution est par ailleurs conforme au droit commun des contrats. Avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016, il était jugé que, par l’effet rétroactif d’un contrat annulé, la responsabilité d’une des parties à ce contrat ne pouvait être recherchée que sur le fondement délictuel ou quasidélictuel (Cass. 3e civ. 18-5-2011 no 10-11.721 FS-PB : Bull. civ. III no 79). La solution a été reprise par le nouvel article 1178, al. 4 du Code civil : indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle.

Source : La Quotidienne – Editions Francis Lefebvre – 26/11/2020